Maman, je pars mourir. Par Larbi At Umalou

mai 17, 2018 by


Il avait quinze ans et la mort s’imbibe déjà de son corps et son âme... Silence on tue à ciel ouvert. 

Il se lève le matin, et comme tous les matins ne pars plus acquérir le savoir à l’école, mais son lot de pierres dans le petit cours d’eau qui scie leur village en deux. Il aiguise sa voix, déploie son drapeau, son keffieh se serre autour de son cou et son doigt rêche témoigne de sa place auprès de Dieu. Il se félicite déjà de son funeste destin.
Il avait quinze ans et demain des youyous, mêlées aux larmes de sa mère s’évanouiront sous ceux d’une autre mère. Le temps qu’il lui est imparti est court. Sa mère se doit de pleurer l’enfant de l’autre, ce n’est pas les morts qui manquent.
Il se lève comme tant d’autres enfants et ne jette même pas un oeil intéressé sur le ballon qui traine au milieu de la cours. Il rêvait qu’un jour il pourrait jouer avec les grands, mais ses rêves s’évanouissent comme des graines de vie. Il ne faut pas perdre son temps, la mort l’attendait depuis qu’il naquit.
Il avait quinze ans, son père croupit en prison et ses frères l’ont déjà précédé avec ce keffieh pour seul linceul et une pierre dans la main pour seule arme. Oui! Il avait quinze ans, et ce matin, il a omis de poser un baiser sur la tête de sa mère en gage de promesse, car l’odeur de la mort et du sang inonda la petite maison dès l’aube. Il ne pouvait la regarder dans les yeux. Ses yeux dégagent déjà les effluves de trépas.
Il avait quinze ans et son sourire put se décrocher un instant en allant rendre visite à ses petits frères dans la petite chambre du fond. Il espère qu’il sera le dernier martyr de la cause. Ils dorment encore. Il se pose toujours la question sur les rêves qu’ils font. Sa petite soeur a l’air de sourire dans son sommeil. Ça remplit sa journée.
Il avait quinze ans et ce soir le monde va se réjouir de sa mort pour les uns ou détourner le regard pour les autres. Oui ce soir, son nom sera gravé ainsi sur l’autel de l’hypocrisie du monde. On le regarde, on le berce d’illusions. Il n’y croit plus. Il avait juste quinze ans, et ce soir il ne tiendra pas la promesse qu’il fait chaque jour à sa mère de rentrer à la maison. Non! Ce soir il enveloppera juste un aveu sous une larme indignée: Maman, je pars pour mourir.

« Je ne plains plus les Palestiniens, mais simplement l’humanité. »

L. At. Umalu

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